• Une rencontre inattendue

     

        Ma meilleure amie a vécu au Pays Bas de 1969 à 2006.

       Pendant les 37 années de son exil volontaire, je lui ai rendu visite un très grand nombre de fois, au moins une fois par an et souvent plus. J’ai toujours (ou presque) fait le trajet en train, c’est dire que je connais le parcours comme ma poche, Quiévy-frontière, Mons, Bruxelles, Antwerpen, Roosendaal, Rooterdam, Nimegen, Arnhem. Dans ces trains internationaux, on rencontre toute sorte de gens, souvent sympathiques ce qui rend le trajet plus court.

       Un matin de 1993, sur le quai de Roosendaal, j’attendais ma correspondance pour Paris. A coté de moi, une toute jeune fille noire attendait aussi avec un sac de voyage. D’abord un sourire timide auquel je réponds, puis elle s’approche et me demande si c’est bien là le train pour Paris, je réponds par l’affirmative, je la sens très gênée, pourtant elle a envie de parler alors je l’y invite.

       Le train entre en gare, elle s’installe tout naturellement à côté de moi et me raconte qu’elle est africaine, de Guinée-Conakry. Son père est le ministre de l’agriculture de ce pays (excusez du peu), il l’a autorisée à voyager en Europe pendant les vacances. Je l’inonde de questions, elle y répond avec plaisir, l’été précédent, elle est allée aux Etats Unis. Les douaniers belges passent, son passeport est en règle, nous continuons notre bavardage, elle m’explique qu’elle va chez un cousin qui habite la banlieue de Paris.

       Là où ça ce corse, c’est avec les douaniers français, elle n’a pas de visa pour la France. Elle l’ignorait, c’est la secrétaire de son père qui avait organisé le voyage, le visa français avait été oublié. Ces messieurs lui demandent de les suivre, elle me jette un regard implorant, je suis impuissante, elle m’embrasse et s’en va. Cinq minutes plus tard, elle revient en pleurs et m’explique que les autorités lui ont demandé de descendre à Bruxelles pour aller au consulat français de Belgique demander cet indispensable visa.

       Dans un discours entrecoupé de sanglots, elle me demande de descendre avec elle pour l’accompagner, je refuse car j’ai mes enfants qui m’attendent, mais elle trouve tellement d’arguments que je finis par accepter. A Bruxelles, on se renseigne sur l’adresse du consulat, mais c’est assez loin, mieux vaut prendre l’autobus. Oui mais voilà, pour prendre le bus il faut des francs belges et nous n’en avons pas. Bon, pas de panique ! ; avec beaucoup de difficultés, nous finissons par trouver un guichet qui accepte de faire le change, elle sort de son sac de voyage un gros paquet de dollars américains enveloppés dans un sachet en plastique, je lui conseille de ne pas montrer qu’elle en a autant, elle est très étonnée que cette monnaie ne soit pas acceptée ici, il faut aussi trouver les consignes pour déposer nos bagages.

      

    Nous voilà assises dans le bus, le chauffeur nous parle au micro pour expliquer qu’en raison d’un problème assez confus le bus démarrera dans vingt minutes. Des oh-oh fusent d’un peu partout et une jeune femme commence à nous raconter sa vie, elle est tunisienne etc., etc., ma co-voyageuse en fait autant, le temps passe et les vingt minutes s’allongent. Voilà que la tunisienne explique que le consulat en question n’est ouvert que le matin, il est 12h10.

       Consternations ! . Mais les tunisiens sont un peuple très accueillant paraît-il, elle invite l’africaine chez elle, elle pourra y téléphoner à son cousin et y passer la nuit, demain matin elles régleront le problème du visa, elle connaît quelqu’un qui connaît…. Depuis un bon moment, je me sens inutile, aussi je dis que puisque tout est réglé, je peux reprendre le train. Elles approuvent d’une seule voix, la jeune fille et moi, échangeons nos adresses et retournons aux consignes reprendre  nos sacs. De la fenêtre du bus, elles me font un vague salut, je suis déjà oubliée. Je me sens un peu frustrée, je n’aurai jamais dû accepter de descendre, me revoici sur un quai, à attendre une heure encore. Je suis arrivée à la maison avec 4 heures de retard.

       Quelque mois plus tard j’ai eu la surprise de recevoir un courrier qui venait de ‘‘Guinea Conakry west Africa ’’, la jeune fille me remerciait de ma gentillesse et me racontait la fin heureuse de son périple en vantant l’amitié exceptionnelle qu’elle avait reçue chez la tunisienne-belges-francophone.

       Tout bien considéré, ce souvenir vaut bien 4 heures de retard !…. 

    Petite-Jeanne

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  • Commentaires

    13
    Lundi 4 Février 2013 à 19:25

    Bonsoir Labiche

    Merci de votre gentil message,, il me fait très plaisir.

    Non, je n'ai pas connu la famille Bourgatte car je suis partie de Loubejac très jeune; mais je  me souviens que mes frères en ont parlé il n'y a pas très longtemps.

    Marceline Loubière ne me dit rien non plus, je ne sais pas s'il elle est parente avec les Loubière de Loubejac que j'ai bien connu!...

    Bonne soirée et peut être à bientôt.

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    12
    labiche
    Lundi 4 Février 2013 à 18:03
    labiche

    bonjour Petite Jeanne! Par hasard, en cherchant des informations sur VILLEFRANCHE DU PERIGORD et sur la famille LOUBIERE, j'ai eu accès à votre blog que j'ai parcouru avec délectation. J'ai été élevé pendant mes deux premières années (1957/1958) au ldt la métairie de l'hôpital entre VILLEFRANCHE et LOUBEJAC par mes grand-parents, famille BOURGATTE. J'ai retrouvé à travers votre récit ; des souvenirs, des émotions, des images, des parfums de ma petite enfance et je voudrais à travers ces quelques lignes vous remerciez de la qualité de votre écriture.

    PS:Avez vous connu la famille BOURGATTE? Avez vous connu Marceline LOUBIERE qui tenait un petit bar sur la place à côté du cinéma? Merci de votre réponse.

     

    11
    Undechussin
    Mardi 13 Novembre 2012 à 23:25
    Bonjour Petite-Jeanne Tout d’abord, toutes mes félicitation pour votre biographie sur votre blog, je suis très touché par cette simplicité et cette vérité qui apparaît dès le début de votre présentation , et tout au long de votre parcours , un véritable panoramique éducatif et sociologique, une vraie histoire du bon sens et de la pure vérité sans artifice , ni fioriture, je ne voudrai pas dire , un chef-d’œuvre , je sais que vous n'en voudriez pas. J'en suis complètement ému, je suis natif de la campagne , et je vous ai retrouvé comme si vous étiez une gamine de mon village de Picardie-Champagne. Je ne vous ai pas lue , je vous dévore , je croque à pleines dents , chaque mots chaque phrases. Plusieurs fois je me retrouve à vos cotés , dans les steppes avec les "bêtes". Moi aussi j'ai connu les bêtes au champs, elles m’ont beaucoup appris. Je devrais raconter l'histoire de ma vache, celle qui attendait que je sois assis dans l'herbe haute, pour venir se reposer à coté de moi, et me regardait avec ses grand yeux !. Voulez-vous que je vous dises?, j'ai versé une larme régulièrement en vous lisant…
    10
    Vendredi 12 Décembre 2008 à 18:29
    ce genre de rencontre amicale c'est comme un coup de foudre .. merveilleux....
    9
    Mardi 28 Octobre 2008 à 10:34
    Bonjour "Petite Jeanne" Très prenante ton histoire... je l'ai lue d'une seule traite hier, oubliant mon déjeuner ! A certains moments je me suis vue... mai 68, les Noëls de notre enfance... C'est vrai aussi qu'à "notre époque" nous n'avions pas de mal à retrouver une place, si nous quittions notre boulot ! Les jeunes ne connaissent pas ça ! Bonne journée à toi et gros bisous. Marishka. PS : Dommage que tu n'écrives plus... moi je le fais au quotidien pour la postérité... Peut-être qu'un jour ma descendance prendra plaisir à lire cette aïeule ! J'ai un double sur mon traitement de textes et sur une clé USB...
    8
    Lundi 27 Octobre 2008 à 12:13
    Merci Beaucoup Marishka
    J'ai écris mon histoire il y a quelques années sur un simple cahier, et depuis que je suis à la retraite je me suis "informatisée". J'ai donc publié mon histoire d'un coup, l'histoire se termine là, je n'ai pas envie de raconter ma vie d'adulte car si je peux être tolérante envers l'enfant que j'ai été, je me sens obigée de "tout" dire , le bon et le moin bon. Donc je m'arrête là, du moins pour le moment!
    7
    Lundi 27 Octobre 2008 à 11:30
    Bonjour Petite Jeanne Merci d'être passée sur mon blog. A mon tour, de venir chez toi, et là je suis éblouie, par cette belle écriture ! J'ai commencé la lecture et j'ai hâte de poursuivre ! Monsieur Undechussin (com) n'exagère pas, je t'assure ! c'est ce que je pense aussi. Mais dis-moi : Comment se fait-il qu'il n'y ait plus d'articles depuis le 28 avril 08 ? Je t'encourage à continuer à nous passionner. Je te fais de gros bisous. Marishka
    6
    Mardi 12 Août 2008 à 22:37
    Merci, je vous soupçonne d’exagérer un peu mais c’est fait avec humour aussi je vous pardonne volontiers !.
    5
    Aga
    Mardi 27 Mai 2008 à 17:40
    bonjour Petite-Jeannne, je trouve ton com, presque par hasard, sur mon blog un peu délaissé... Et je me demandais par quel hasard tu avais atterri chez moi :D quoi qu'il en soit, merci de ta visite et de ton petit mot bonne fin de journée bisous ps : y'a de quoi lire, par ici ;)
    4
    Jeudi 15 Mai 2008 à 12:49
    Merci Janlui, à bientôt.
    3
    Jeudi 15 Mai 2008 à 12:03
    Bonjour, c'était ma première visite dans tes pages et j'ai adoré m'y perdre ! Un vrai moment de bonheur A bientôt
    2
    Samedi 3 Mai 2008 à 11:14
    Oui c'est vrai. Merci Cafeïne.
    1
    Samedi 3 Mai 2008 à 00:07
    comme quoi, lorsqu'on rend service, on en est remercié d'une façon ou d'une autre :) la vie est belle bonne soirée la miss
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