• 104: La misère

        Suite...

    Tu sais pas quelle vie j’ai mené!. Les petites pommes de terre on les cachait derrières les `arques´.

      «-Il y en a bien peu!:».

      «-Ah moi j'ai tout épluché!»

      «-Tu est sur oui?».

       Et le jour qu’on déplaçait une arque je te dis pas le dégât!.0 L 9 (2) Tu vois ce que c’est!. Tu sais ma mère en ce temps là, elle était très maigre, elle se privait de manger pour nous donner à nous. J'ai vu des gens qui le savaient, quand on passait devant chez eux, ils nous faisaient entrer, à moi ils me donnaient une pomme par exemple et m'envoyaient jouer dans la cour. Et pendant ce temps, ils la faisaient manger. S’ils lui donnaient quelque chose à emporter, ils savaient qu’elle nous le donnerait à nous. Alors qu’elle était issue d’une famille des plus aisées. Quand j’y pense, ça me fait mal aux tripes, j'ai jamais raconté ça à mes enfants ni à personne tu vois. Et j'ai comme ça un tas de choses à l'intérieur de moi tu vois. Ça c’est les périodes de déplacement de mon père. Lui, il n’envoyait pas un rond. C’est tout ça et d’autres choses ensemble, je ne me sentais pas bien.

       Aujourd'hui, quand j'entends ma belle sœur dire: «-on y mangeait bien chez la grand-mère!». Je n'ose pas dire que j'ai connu la vrai FAIM et ma mère encore pire.

        L’injustice ou la misère?.

       Les deux mais quand je suis parti, ça allait déjà mieux, beaucoup même.    L'injustice oui, la misère il y en avait déjà plus.

       Ton père trop sévère!.

       Oh oui! tu sais après, moi j'ai envoyé de l'argent pour retaper toute la maison, acheter des vaches etc, et aujourd’hui, à la moindre bricole, on m'envoie une facture tu vois. Tu sais que mon père était le premier servi à 0 L 9 (1)table, et les meilleurs morceaux. Parce que lui travaillait. Tu vois le principe en ce temps là!. Moi j'ai toujours dit: Mes enfants d’abord, moi après, et là où mes enfants ne pouvaient pas aller, je n’y allais pas c’est tout.

       Je me rappelle très bien de mes premières chaussures. Tu vas rigoler, moi aussi aujourd’hui je rigole. Des belles chaussures noires vernies, je marchais exprès sur les ronces, je savais que ça ne piquait pas. La première averse venue, il n’est resté que les semelles en bois, c'était du carton. Tu sais quand c'était le plus difficile de marcher pieds nus?. L'été, en revenant de l'école, sur le sable chaud. On faisait exprès de rentrer les pieds dans le sable, c'était moins chaud.

       Et quand on se buttait avec le gros orteil sur les racines des pins qui sortaient du sol, encore aujourd’hui j'ai l'ongle du pied gauche tout noir et ca vient de là. Quand on nous envoyait faire des courses on courrait avec un cerceau soit la partie métallique d'une roue de vélo soit un cerceau découpé dans un pneu de voiture coté fil de fer (extrémités des pneus) nous guidions ca avec un bâton. Il y avait différentes façons de le faire selon le cerceau .

       J'ai comme ça des souvenirs qui me reviennent mais ils sont tous mélangés.

       C'est pas grave, dis comme ca te vient...

      Et même après, quand j’avais des vraies chaussures, pour les longues marches, on les enlevait, on les attachait ensemble pour les porter sur l'épaule et on les enfilait aux pieds à la porte de l'église .

       Pour économiser?.

       Parce qu’on n'avait pas l'habitude, aussi on avait du mal à marcher avec.   On attrapait facilement des cloques aux pieds. Il fallait acheter des plus grandes, pour ne pas changer souvent à cause de la croissance.0 L 9 (3) Aujourd’hui même, je ne sais pas mettre des baskets sans chaussettes, tu te rends compte!.

       Oui, je me souviens aussi que mon père avait coupé le bout de mes chaussures devenues trop petites pour faire dépasser les orteils, je n'avais pas souvent des neuves. Et je vais te dire une chose que même aujourd'hui je n'ose pas dire à l'ophtalmo quand il me questionne: ma mère m'a obligée à porter les lunettes de ma sœur parce que je n'y voyais pas bien. Misère + ignorance, j'ai souvent peur que nos enfants nous prennent pour des fous...

    A suivre (105)

     

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  • Commentaires

    8
    marmota
    Mardi 13 Novembre 2012 à 23:17
    je me sens toute "chose". merci
    7
    Samedi 26 Novembre 2011 à 17:09
    Bonjour Petite jeanne

    Que la vie était rude....

    Je me remets de mes travaux domestiques. Je n'ai plus l'habitude, ni la force ni... l'âge...

    Je te souhaite une bonne fin de journée et un beau week end.

    Gros bisous.

    Marishka
    6
    Vendredi 25 Novembre 2011 à 19:29
    Votre récit, celui de ton ami et tes ajouts, est très émouvant, Petite Jeanne. Ma mère a vécu elle aussi des moments difficiles. Née dans une famille nombreuse, elle a été placée comme bonne à 14 ans alors qu'elle avait les capacités pour continuer ses études et qu'elle aurait voulu devenir coiffeuse. Bisous
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    5
    Lundi 21 Novembre 2011 à 18:30
    Jeanne que de souvenirs , qui restent marqué à vie ,bien sur nos enfant ne peuvent imaginer un seul instant qu'avant nous ne décidions de rien , que nous avions la vie tracée par nos parents sans jamais rouspéter , Mais sont -ils pour cela plus heureux je n'en sais rien !!!!! en tout cas tu mérites d'avoir une vie calme et sereine maintenant big big bisous affectueux
    4
    Lundi 21 Novembre 2011 à 16:51
    Tu as raison de raconter tout ça. La vie avant n'était pas rose chez tous !!
    La preuve. Aujourd'hui nos enfants ne peuvent même pas imaginer, même si ils essaient car c'est trop incroyable pour eux !
    Douleur morale et physique ! Et ça reste toute la vie des souvenirs comme ça !
    Gros bisous à toi Petite Jeanne. A très bientôt. Jetelle 76.
    3
    Lundi 21 Novembre 2011 à 13:36
    coucou Jeanne
    on voit bien la , que les gens étaient solidaires .
    va trouver aujourd'hui quelqu'un qui te fais entrer
    dans leur maison pour te donner a manger si tu es
    dans le besoin . c'est chacun pour soi de nos jours .

    c'est bien que tu puisses raconter tout ça ici . je
    suis sure que cela ne peux te faire que du bien .
    et nous , cela nous permet de voir combien nous avons
    été et nous sommes heureux de nos jours .
    bonne journée a toi. bisous Jeanne
    2
    Lundi 21 Novembre 2011 à 12:32
    quand les souvenirs sont gravés pour l'éternité !
    merci de nous ouvrir les pages de ton livre de vie ..
    bonne semaine et bises
    1
    Lundi 21 Novembre 2011 à 10:28
    Bonjour Petite Jeanne,
    Les larmes me sont monter souvent aux yeux lors de votre récit.Et des conversations me reviennent en mémoire, celle que nous avions avec mes grands-parents. Mon Dieu que de souffrance à cette époque ! à très bientôt. marie
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